C'est quoi les jardins numériques, ces espaces qui pullulent sur le web ?

© Pandora, spring-summer launch Collection, 2019

Loin des fils formatés d’Instagram et Tik Tok, les digital gardens sont des pages web intimes et créatives. Une tendance suivie par de plus en plus d’internautes, dixit le MIT Technology Review.

Souvenez-vous, 2006, MySpace. Vous aviez votre playlist de morceaux choisis avec soin. Vous passiez un temps fou à sélectionner le style de votre page, ses couleurs et sa police. Changer de petits détails de manière un peu obsessionnelle était une occupation à part entière. Restez tranquille, je ne suis pas en train de vous annoncer le grand retour de MySpace. Mais la tendance qui consiste à personnaliser une page web pourrait, elle, bien faire son come-back. Et c’est le très sérieux MIT Technology Review qui le dit.

Ces pages ou sites web appelés digital gardens (jardins numériques) ressemblent un peu aux collages très personnalisés des pages MySpace et Tumblr d'antan mais avec un côté plus geek. Ceux qui se lancent choisissent souvent des sujets spécifiques et n’hésitent pas à mettre les mains dans le code pour créer un site de toutes pièces. (On trouve certains tips techniques sur ce groupe Reddit). Le résultat est loin de l’esthétique formatée de Facebook, Instagram ou TikTok. Celui de Mélanie Richards ressemble à une belle bibliothèque virtuelle qui regroupe des citations des livres qu’elle a lus. Celui de Sarah Gardner, informaticienne, a une esthétique plus rudimentaire mais il est extrêmement détaillé. Il se consacre à tous les musées qu’elle a visités.

Ceci n'est pas un blog

On vous voit venir : digital gardens, est-ce que ce ne serait pas qu’un nouveau terme pour désigner un simple blog ? Pas tout à fait, et les auteurs de ces jardins tiennent d'ailleurs à faire la différence. Car, contrairement à un blog dont l’objectif est de présenter des publications finies, un digital garden se cultive au fur et à mesure, c’est un « process », explique le développeur web Joel Hook sur son site (pardon, son digital garden) qui agglomère des réflexions sur des sujets très différents. Ses notes ne sont pas hyperstructurées, il s’agit plutôt de fragments de phrases mis bout à bout. Certaines prennent progressivement la forme d’articles plus aboutis, d’autres sont laissées en jachère... Ses notes ne sont pas archivées de manière chronologique, on navigue de l’une à l’autre via liens internes et recommandations de l’auteur.

Par ailleurs, contrairement aux réseaux sociaux, les digital gardens n’ont pas pour vocation de viser une large audience, l’auteur s’adresse surtout à lui-même, précise Tom Critchlow, un consultant également adepte de ces jardins numériques. Visiter quelques-uns de ces sites donne la sensation troublante de consulter un carnet de notes très personnel, d'accéder au processus de réflexion d'une autre personne.

Pour échapper au doomscrolling, cultivez votre jardin

Selon le MIT Technology Review, cultiver son digital garden serait aussi un moyen d’échapper à l’internet anxiogène – coucou doomscrolling et autre Zoom fatigue – que l’on connaît aujourd’hui.

Pas sûr que cette tendance devienne massive – elle requiert tout de même quelques compétences techniques – mais elle reflète un besoin de créer des espaces web plus intimes. Besoin auquel répondent, d’une autre manière, des réseaux sociaux comme Discord où l’on se regroupe en communautés semi-privées autour d’une passion commune.

Marine Protais

À la rubrique "Tech à suivre" de L'ADN depuis 2019. J'écris sur notre rapport ambigu au numérique, les bizarreries produites par les intelligences artificielles et les biotechnologies.
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